Le manque de communication est source de tensions chez de nombreux couples, surtout lorsque Monsieur est accusé par Madame d’être un bloc de pierre muet, incapable de s’ouvrir à l’autre. Pourtant, les hommes communiquent, il suffit simplement d’apprendre à les écouter.
« Quand je lui demande à quoi il pense, il me répond « à rien », « Il ne parle jamais de ce qu’il ressent », « J’ai du mal à savoir s’il m’écoute, s’il s’intéresse à ce que je lui dis». Mutiques, absents, renfermés, pour nombre de leurs compagnes, les hommes demeurent des énigmes. On leur reproche de ne pas s’exprimer, de ne pas s’impliquer dans le quotidien du couple, de fuir les conversations, bref de ne pas assez communiquer. Pourtant, les hommes s’expriment, à leur manière. « Avec Cécile, mon amie, on est deux opposés, explique Bastien, 39 ans. Elle a besoin de tout extérioriser, de disséquer le moindre petit couac dans notre quotidien, qu’il s’agisse de la manière dont on s’organise pour savoir qui va faire les courses, de notre futur projet d’achat immobilier, ou de quand je vais la demander en mariage. Elle a besoin de débattre, d’échanger, d’en parler encore et encore. Moi c’est différent, j’intériorise, et seulement une fois que j’ai fait mon choix, je l’affirme haut et fort et j’en parle. »
Problème, comme il lui faut parfois plusieurs jours pour être certain de ses décisions, Cécile a souvent l’impression que Bastien ne se sent pas concerné par ce qui se passe dans leur couple ou qu’il ne l’écoute pas. « C’est faux, j’ai juste besoin de plus de temps et de calme pour réfléchir », tempête Bastien qui s’agace de voir sa compagne le traiter comme un « homme des cavernes qui ne communique pas. » Rien d’étonnant à cela. Beaucoup d’hommes ont en effet besoin de se ressourcer et de prendre de la distance. Ce n’est pas forcément le signe d’un problème dans le couple, mais après des siècles de patriarcat ayant véhiculé une vision de l’homme viril, maître de ses émotions et peu enclin aux effusions et aux confessions sentimentales, difficile pour certaines de ne pas voir chez leur partenaire le cliché de l’homme taciturne qui ne ressent rien.
Un rapport à l’intimité différent
Pourtant, un homme qui ne s’exprime pas n’est pas forcément un homme qui n’aime pas.
Le rapport de l’homme avec l’intimité est simplement différent de celui des femmes. Même si cela tend à changer avec des nouveaux papas bien plus démonstratifs et attentionnés, la sociologue Eva Illouz rappelle que ce sont les femmes qui ont de tout temps été en charge de la gestion affective des relations, là où les hommes étaient les détenteurs de la réussite professionnelle et matérielle.
Aujourd’hui, même s’ils le font différemment des femmes, les hommes s’expriment de plus en plus. Cela passe par des gestes, le partage, des attentions, l’écoute, la compréhension… Chaque homme s’approprie son propre langage amoureux et la femme doit l’entendre et ne pas réduire simplement l’homme à « il ne parle pas ». Une tâche difficile pour un couple, d’autant plus lorsque les femmes véhiculent elles-mêmes, parfois inconsciemment, quelques contradictions héritées de stéréotype de genre éculés. Ainsi, alors qu’elles sont nombreuses à encourager leur moitié à se livrer, certaines sont parfois déstabilisées, voire agacées, de voir leur partenaire s’épancher. Ces moments de confessions masculines, qu’elles ont pourtant ardemment souhaités, peuvent venir se heurter à l’image clichée de l’homme idéal qu’elles ont pour beaucoup encore en tête : celle d’un mâle alpha viril et taiseux. En découlent des injonctions contradictoires qu’il est compliqué de gérer pour des hommes sommés à la fois de s’ouvrir et de se confier, tout en demeurant « le roc » de la maison.
Chaque homme s’approprie son propre langage amoureux et la femme doit l’entendre et ne pas réduire simplement l’homme à « il ne parle pas ».
Pour faire face aux possibles incompréhensions, il est ainsi important de créer des moments intimes, vrais, pour booster la confiance et permettre au plus pudique de s’exprimer en toute liberté, sans jugement. Sans oublier que la solution ne réside pas forcément dans de longues discussions. Au contraire, il suffit parfois d’accepter de se taire et de prendre du recul, pour laisser place à un silence fait de complicité, de confiance et de compréhension de l’autre.
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